Fin des spéculations! Préconvoqué par la France, appelé par l’Algérie pour deux matches amicaux programmés fin mars, le milieu offensif de Lyon (21 ans), international Espoirs français, a finalement décidé de poursuivre sa carrière internationale en Bleu. Mardi, dans les colonnes du journal L’Équipe, Nabil Fekir est revenu sur les raisons de son choix. Extraits.
Depuis plusieurs semaines, votre avenir international est l'objet d'intenses spéculations. Dimanche, “L'Équipe” affirmait que vous aviez opté pour la France, comme Bernard Lacombe, le conseiller de Jean-Michel Aulas à Lyon. Vous confirmez ?
Nabil Fekir : Oui, je confirme. La France, c'est mon choix.
Qu'est-ce qui a fait pencher la balance ?
Je me suis entretenu avec Didier Deschamps, qui s'est montré très convaincant. Il m'a dit qu'il comptait sur moi, que j'étais un joueur intéressant. Il y a une échéance importante qui arrive, l'Euro 2016. J'ai très envie d'y participer. Je suis français d'origine algérienne, et j'en suis très fier, mais j'ai estimé qu'il était de mon intérêt d'opter pour la France.
Vendredi dernier, vous avez appelé Christian Gourcuff, le sélectionneur de l'Algérie. Que lui avez-vous dit ?
Oui, je l'ai appelé pour lui dire que mon choix n'était pas fait. Je n'aurais pas dû l'appeler. J'ai commis une erreur. J'avais un peu la pression, en fait.
Assumer ce choix, c'est difficile ?
Je n'ai pas peur, en tout cas. J'ai fait un choix personnel et j'espère que tout le monde le respectera.
Comment espérez-vous être perçu en Algérie ?
Je m'y rends de temps en temps. J'espère juste être considéré comme un Français d'origine algérienne. Ni plus, ni moins. Moi, j'aime autant la France que l'Algérie. Tout simplement.
De loin, on peut avoir l'impression que l'Algérie représentait le choix du cœur, la France celui de la raison.
Chacun peut comprendre que je n'étais pas confronté à un choix simple. Je n'avais jamais été sélectionné en équipe de France jeunes. En revanche, j'ai déjà été appelé une fois en Espoirs. Il y a donc une certaine logique à ce qu'après les Espoirs mon ambition soit de rejoindre la grande équipe de France. L'Algérie est une partie de mon cœur, la France aussi. Mon père aurait aimé me voir jouer pour l'Algérie. Mais c'est moi le joueur, c'est moi qui suis sur le terrain. Ce sera l'équipe de France et ça ne changera plus ! Je suis très attaché à cette équipe. Je voudrais qu'il n'y ait aucune ambiguïté à ce niveau-là.
Le règlement vous permet de porter le maillot de l'Algérie si vous ne jouez que des matches amicaux avec les Bleus. Et le prochain match officiel de la France, c'est en juin 2016 avec l'ouverture de l'Euro…
J'ai pris une décision, et elle est définitive.
Dire non à l'Algérie, c'est…
C'est dur. D'autant que beaucoup de gens m'ont poussé à jouer pour l'Algérie.
Vous aviez cinq ans en 1998 quand les Bleus ont été sacrés champions du monde, sept en 2000 quand ils ont remporté l'Euro. Que représente l'équipe de France pour vous ?
J'ai suivi le Mondial 2014. La France a réussi son parcours mais est tombée sur une équipe d'Allemagne costaude. Ça reste une très grande nation de football. Elle est entrée dans l'histoire du foot quand j'étais tout petit. J'en garde un souvenir assez lointain, de gens heureux dans les rues. Ça fait rêver tout ça, évidemment. Mon plus gros souvenir, c'est la Coupe du monde 2006, la panenka de Zidane en finale contre l'Italie. Jouer pour la France, c'est un rêve de gosse pour moi.
Chez les Bleus, il va sans doute vous falloir être patient. Avec Valbuena, Benzema et Griezmann, Didier Deschamps tient un trio d'attaque…
Il y a effectivement de très, très bons joueurs. C'est un risque à prendre et je suis prêt à le prendre. Si je suis appelé chez les Bleus, je sais très bien que ce n'est pas pour être titulaire d'entrée. Une carrière se construit par étapes. La France a les moyens de gagner à nouveau des titres.
Vous imaginez gagner l'Euro ?
Mais je ne sais même pas si je serai dans le groupe ! Maintenant, les Bleus ont toutes les qualités pour s'imposer, oui.
Si vous êtes appelé, vous savez à quoi vous attendre. On va forcément vous comparer à Zidane…
Honnêtement, la comparaison est flatteuse pour moi. Mais soyons sérieux, je suis très, très loin du niveau de Zidane. Je suis assez lucide, et également les gens qui m'entourent, me conseillent ou m'entraînent, pour savoir que je suis très, très loin du niveau de Zidane. Je ne suis pas encore un joueur de niveau international, mais je vais bosser dans mon club pour tenter d'y parvenir. Pour en revenir à Zidane, on a au moins un point commun. Nous avons dû faire le même choix. Comme moi, il est né en France. Comme moi, ses parents sont nés en Algérie. J'ai fait le même choix que lui.
Vous n'aurez que vingt-deux ans le 18 juillet prochain. Parfois, n'avez-vous pas l'impression que certains débats vous dépassent ?
Je suis passé par des moments compliqués, évidemment. J'ai essayé de faire un peu le vide et de me concentrer sur mon club, l'OL. Je suis encore jeune, c'est vrai.
À Montpellier, dimanche, vous avez réussi une prestation d'autant plus impressionnante que vous veniez de vivre plusieurs journées très agitées…
Je crois que j'en ai impressionné plus d'un, oui. C'est une question de mental. Je suis un joueur qui a du mental, le caractère pour faire abstraction de tout ce qui peut se dire. J'ai préparé le match comme d'habitude. Mes coéquipiers n'ont pas eu une attitude différente à mon égard, eux non plus. Ils ont confiance en moi. Le staff aussi. Si j'avais à cœur de faire un très gros match, c'était pour répondre aux piques de mon coach. Je crois que j'ai répondu présent.
Avant ce match, Hubert Fournier, votre entraîneur, vous avait invité à davantage vous exprimer sur le terrain que dans les médias.
Je suis tout à fait d'accord avec lui, le terrain est le plus important.
Vous imaginez jouer contre l'Algérie avec la France ?
Franchement, on n'en est pas encore là.
On dit que le poids de votre famille a failli vous faire changer de décision ?
J'ai échangé avec mon père. Nous nous sommes mis d'accord et il respecte mon choix.
Pour en savoir plus :
- Lacombe confirme que Fekir "a changé d’avis" (vidéo)